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ceci est un test ca c'est GRAS
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“La peinture est une catastrophe qui attend de se passer” clame Deleuze dans son recueil de cours “Sur la peinture” (Éditions de Minuit, 2023).
Le canevas blanc, c'est une absence. A la première trace de peinture, la première tâche, c'est la catastrophe qui commence. La encore, je cite Deleuze. Il y a à partir de ce moment, l'univers entier qui s'infiltre dans les pinceaux. Tout est possible, les chefs d'œuvre comme les catastrophes, en tant que peintre je navigue cette folie.
Je vois sur internet des artistes commencer leur travail avec des grands coups de pinceau, de fusain (https://www.reddit.com/r/BeAmazed/s/8wnKC0LNhA ); des actes plus physiques que vraiment artistiques, comme des escrimeurs on les voit trancher l'air, le geste prime sur le sens, le symbole sur la signification. Je vois ça comme une manière de dompter la catastrophe, l'accélérer, l'amadouer et ensuite reconstruire. Si le canevas est plein de ses propres catastrophes, alors la catastrophe inconnue, elle, n'arrive pas.
Cette absence catastrophique de sens ou de symboles, je la retrouve dans Ferdydurke (1937) de Gombrowicz ainsi que chez Musnil et son Homme Sans Qualités (1930). Dans ces livres, les protagonistes sont perdus par le manque de signification et de sens de leur existence car ils dérivaient celui-ci du contexte de leur existence. L'art c'est un peu pareil, la peinture finalement intéresse peu sinon l'artisan, celui qui se concentre sur le détail et le travail de reproduction. Les peintres modernes (je parle de la période du post-impressionisme ici) l'ont bien compris, ce n'est pas simplement une reproduction exacte qui intéresse, celle ci a vite été rendue obsolète par la photographie. Ce n'est pas la reproduction de ce qu'on voit, mais ce dont on pense voir. Le symbole de tel ou tel object, couleur ou personne.
Que dire d'une peinture reproduite à la perfection, sinon “c'est joli” ou “on voit bien ce que c'est”? Pourquoi certaines œuvres restent dans les mémoires et d'autres même si tout autant “bien faites” sont oubliées? Gérôme et Bouguereau ne brillent finalement que dans des débats d'initiés et dans les musées.
Personnellement, je pense que c'est la connexion entre l'artiste et le public. Lorsque l'artiste réussi à toucher le public par une histoire, par un contexte, par un symbole, le public sera convaincu. Mais comme l'écrit Bianca Bosker dans Get The Picture (2024), le monde de l'art lui aussi est tenu a ses propres moyens de communication et de gardiennage (gate-keeping). Aujourd'hui, l'art contemporain est ancré dans le contexte de sa création, dans le contexte de pourquoi on le crée. Cela le rend peut-être abscon pour le public qui, comme moi, doit se référer aux notes explicatives pour comprendre de quoi il en est. Il est même souvent facile de se moquer d'un art contemporain qui paraît illisible et abstrait.
Pourtant ça serait dommage de s'arrêter sur un tel jugement, puisque, j'ai pu l'expérimenter, l'art se vit avant de se regarder. Je m'explique, il y a quelques années, à la Berlinische Gallerie (2018, exposition sur le groupe de Novembre), j'ai vu un Mondrian (tableau 1, 1921) pour la première fois. Ce n'était pas un grand tableau, pas plus grand qu'une feuille A2. Ce tableau m'a retourné. Je pense que c'est là que j'ai eu la première graine qui m'a donné envie de faire de l'art. Chaque couleur, chaque ligne semblait pleine d'une vie totale. Comme si leur présence sur la toile était destinée, parfaite. L'agencement était merveilleux. Je ne m'attendais pas à une telle sensation face à un tableau qui peut être facilement jugé et repoussé d'un revers de main avec un “un enfant peut faire cela”. Pourtant le voir en toile et en peinture fut une expérience inoubliable.
Or, non seulement ce tableau m'a touché en tant que public, et donc la catastrophe a été évitée par l'artiste. Cette catastrophe dont parle Deleuze a d'autres caractéristiques dont je parlerai peut être dans un autre billet. Mais pour l'instant, c'est réellement la perte de contact entre l'ego de l'artiste et celui du public que je considère comme étant la catastrophe à éviter. Comme les personnages de Gombrowicz et de Musnil, se retrouver sans contexte et sans explication est une catastrophe car elle amène juste à un manque de compréhension de l'objet qu'on observe, voir du monde dans lequel on vit.
Peut-être cette catastrophe n'est pas juste limitée à l'art...
from Blog de Patate
Mes horaires et conditions de travail s'étant grandement allégées depuis novembre (alors que paradoxalement je fournis un effort d'exécution bien supérieur, cf. la mention “de labeur” en suffixe au nom de ma convention collective), mon sentiment de disponibilité revient doucement. C'est agréable. Je retrouve un peu plus mes ami·es, je pense à inviter, je suis invité en retour, je me sens plus détendu à l'approche des mes obligations domestiques en fin de journée. Et soudain, ce petit vide tantôt angoissant, tantôt excitant. Ok. Peut-être suis-je prêt à refaire de la musique en amateur avec des gens ?
J'avais oublié un aspect dont je m'étais soigneusement tenu à l'écart pendant mes quinze années de pratique musicale entre 2001 et 2017 (oui ça fait 17, bravo) : s'il n'existe aucune frontière à ce phénomène qui touche toutes les couches de tous les domaines et que donc la musique n'est pas à proprement parler LE loisir ou LE métier où ça s'exprime, bordel de cul que les mecs sont chiants.
Possessions matérielles, mansplaining, sur-technicité, il m'a fallu trois minutes de scrolling dans une communauté d'annonces locales en ligne pour me rappeler qu'on est, les mecs cis, en surnombre. Et vas-y que je me justifie du nombre d'années de pratique, que je mets en doute le nombre d'années de pratique des autres quand ils postent leur annonce, je sais te dire la diff' entre deux modèles d'ampli similaires dont je connais également les chiffres et codifications en suffixe des noms, je vais te donner des conseils que tu n'as pas demandés au bout de trois paragraphes de “partage” d'expérience(s), je vais même te dire comment orthographier le nom de ton groupe. Une fois “casés”, ça donne ces guerres de volume d'ampli et les acouphènes qui vont avec, les ricanements à la simple mention des considérés “sous-genres” musicaux qui ne requièrent pas la technicité qu'ils ont acquis dans la douleur et la persévérance pour se rapprocher des étiquettes qui méritent de mettre du pognon pour écrire leurs noms en dorure à chaud sur les livrets de partitions ou les affiches de festivals.
Je suis un peu dans la mouise. Il va me falloir, pour mon plaisir pur de jeu, attendre et/ou solliciter des goûts musicaux bien particuliers et peu représentés, et en plus trier les gros cons. Les musiciennes ont compris le truc avant tout le monde, douloureusement, et ont rassemblé cette force nécessaire de soit jouer solo, soit jouer entre elles. Je n'ai pas cette confiance. Plus précisément : j'ai le confort de n'avoir jamais eu besoin de rassembler cette force. Et puis bon la batterie, si ça a l'avantage d'être extrêmement accessible et d'avoir un jeu qui peut être déployé en fumiste sur l'instant, ça a l'inconvénient de ne fournir – me concernant en tout cas – aucun plaisir en solo.
Je vais attendre. Mais l'attente c'est long et ça donne envie d'agir. Agir, ça serait d'aller faire chier tous ces petits mecs dès qu'ils la ramènent avec leur regard espiègle ou ténébreux sur leur photo de profil en noir et blanc. Ou alors les aiguiller vers ce post de blog. Ou bien continuer d'attendre la petite perle de personne qui postera prudemment son annonce, sachant elle aussi ce qui l'attend, mais qui aura eu plus de volonté et de résilience que moi.
from Blog de Patate
Suite du billet S'auto-publier : le fanzine (partie 1)
On attaque la partie la plus technique et un peu de matériel sera nécessaire.
Matériel :
Une imprimante capable de faire du recto-verso (le recto-verso manuel c’est faisable sinon)
Une agrafeuse à cheval (prévoir entre 150 et 200 balles) ou si c'est trop cher, une agrafeuse « bras long » (ça se trouve à 20-30 euros) qui est trop cool parce qu'elle a la profondeur nécessaire pour aller agrafer le milieu de feuilles posées à plat.
(optionnel) Des trucs lourds (grands et gros livres, ramettes de papier)
(optionnel aussi) Une cisaille, (entre 50 et 250 euros selon le nombre de feuilles que ça va être capable de couper) ou une éponge abrasive
Logiciel :
Linux : texlive-extra-utils
Windows : Simple Imposition
macOS : BookletCreator (20$)
Il va s'agir de prendre les pages de votre document et de les disposer de sorte qu'elles soient dans le bon ordre une fois imprimées face à face sur des feuilles recto-verso pliées ensemble. Le terme “imposition” peut aussi concerner le fait de dupliquer des pages sur une même planche pour en faire des flyers une fois ces planches découpées.
On va utiliser des outils automatisés dans ce but, mais pour les plus curieux·ses, on va voir en détails quelle est la logique derrière.
La difficulté de l'imposition en brochure est que la première feuille va contenir à la fois les deux premières et les deux dernières pages du document. La seconde contiendra à la fois les deux suivantes et les deux avant-dernières. Etc. Prenez trois ou quatre petites feuilles, pliez-les ensemble, tournez les pages comme si elles étaient agrafées ensemble et numérotez-les dans l'ordre de lecture. Maintenant, éclatez, dépliez tout et regardez : c'est le bordel. Si on devait disposer les pages à la main sur un logiciel de PAO type InDesign ou Scribus, il faudrait créer un document dont le nombre de pages serait égal à la moitié du nombre de pages total de votre création, que ces planches soient orientées en paysage et au format supérieur (si vous avez créé en A5, disposez sur du A4, sur du A3 si vous avez créé en A4). Il vous faudrait ensuite les disposer en commençant par mettre la page 1 à droite de la première planche. Vous mettriez ensuite la page 2 à gauche de la deuxième planche, continueriez en zigzaguant ainsi jusqu'à la dernière planche, feriez demi-tour et rezigzagueriez en remontant. Pour une brochure de 8 pages format A5 fermé, A4 ouvert, vous obtiendriez ceci sur vos 4 planches A4 paysage :
Mais on ne va pas faire ça, c'est chiant. On va utiliser des scripts automatisés parce qu'on n'est pas venu·e·s là pour souffrir okay ?
Naviguez dans vos dossiers jusqu'à celui contenant votre PDF original, clic-droit sur un espace vide de la fenêtre de votre navigateur de fichiers, “Ouvrir dans un terminal” puis entrez cette commande :
pdfbook2 NomDeMonFanzine.pdf --paper=a4paper --short-edge --no-crop
Vous aurez un nouveau PDF dans votre répertoire, et il sera prêt à imprimer.
Indiquez au logiciel l'emplacement de votre PDF original, cochez “booklet printing”, cliquez sur “Action!” Vous aurez un nouveau PDF dans votre répertoire, et il sera prêt à imprimer.
Indiquez au logiciel l'emplacement de votre PDF original, cochez la première case “Auto paper size”, indiquez que vous voulez traiter toutes les pages et ne cochez rien du reste. Cliquez sur “Create Booklet”.
Vous allez ouvrir le PDF imposé et l'imprimer en recto-verso.
C'est l'étape où vous me verrez navré d'annoncer qu'il n'est pas possible de vous donner d'instructions précises. Je ne sais pas quelle imprimante vous avez, si elle peut faire du recto-verso, si malgré l'absence de recto-verso elle propose quand même dans ses pilotes de faire du recto-verso manuel, il va vous falloir regarder dans ses réglages d'impression, faire des essais, expérimenter.
Votre fanzine est imprimé en 50 exemplaires, c'est tellement beau que vous avez relu, trouvé trois fautes d'orthographe et une typo, ragé et insulté un dieu quelconque ou l'air de votre appartement. Ça veut dire qu'on peut passer à l'étape suivante.
Maintenant, il faut que les pages tiennent ensemble.
Pliez votre exemplaire, les feuilles les unes dans les autres. Si vous avez une agrafeuse à cheval, cela vous permettra de positionner votre document sur l'appareil, et si vous avez une agrafeuse bras long ça vous permettra, une fois le document remis à plat, d'avoir visuellement un repère des endroits où agrafer.
Agrafez. Chkloc ! Chkloc ! Mettez deux agrafes, au milieu évidemment. Espacez-les de sorte qu'elles ne soient ni trop près des bords de la feuille, ni trop proches l'une de l'autre.
La couture est aussi une option si on ne veut ou ne peut pas agrafer.
Voilà, vous avez votre fanzine. Mais y a deux petits trucs qui clochent. D'abord ça :
C'est volumineux, ça ne tient pas très bien à plat voire ça a tendance à s'ouvrir tout seul. Dans l'absolu on peut l'ignorer. Mais si vous sentez que l'esthétique vous dérange, ou si vous sentez venir le problème de manipulation et de stockage de plusieurs dizaines d'exemplaires ainsi boursouflés, on ne pourra pas y remédier, mais on pourra l'atténuer. L'astuce, c'est de prendre quelques exemplaires, entre 2 et 5 selon l'épaisseur de chacun, et de leur faire passer la nuit empilés sous des poids qui couvrent entièrement leur surface (mettez des trucs bien lourds hein, genre plusieurs ramettes de papier, dicos/encyclopédies, l'humour de votre oncle). Pensez à les poser sur une surface bien lisse d'abord, pour ne pas qu'un malencontreux relief bousille les premières pages de l'exemplaire du dessous.
Ensuite, y a ça :
Ça non plus ce n'est pas grave du tout, on peut hausser les épaules d'un air dédaigneux. Mais bon, ça peut enlever un certain confort pour feuilleter et puis ce n'est pas très joli. Si vous voulez vous y attaquer, il va falloir rogner.
Trois options s'offrent à vous :
Le massicot. Grosso merdo entre 250 et 10.000 balles des premiers modèles manuels qui coupent 50 feuilles max aux gros machins électriques à presse qui n'ont pas peur des ramettes de papier 350 g/m². Je suggère qu'on oublie.
La cisaille. C'est comme les gros massicots, plus c'est capable d'enquiller des feuilles, plus c'est cher. Votre fanzine, s'il fait 20 pages, va vous faire imprimer 5 feuilles, mais une fois pliées en deux vous allez vous retrouver avec l'équivalent de 10 feuilles à couper d'un coup. Une cisaille pour 10 feuilles, c'est 50 euros. Une cisaille pour 35 feuilles, c'est 250. La méthode est simple : vous soulevez la lame à fond, vous glissez votre fanzine sous la plaque en ne faisant dépasser que de très peu, et vous y allez, vous coupez ce qui dépasse. Pas d'un coup sec parce que c'est n'importe quoi, pas trop mollement non plus parce que ça va vous demander au final trop de force, mais vous y allez, avec fermeté et détermination. Et voilà, la tranche est bien lisse, bien plate, on peut feuilleter avec le pouce avec autant de fluidité que n'en incarne une sauce à la crème (c'est tout ce que j'ai trouvé comme comparatif, en même temps je viens de manger aussi).
Une éponge abrasive et de quoi serrer (étau, planches). Vous calez plusieurs exemplaires de votre livret à la même hauteur, vous les serrez bien à hauteur des petites feuilles qui dépassent, et vous poncez. Le rendu sera différent d'avec la méthode de la cisaille, mais ça fera le taf tout aussi bien, avec ce petit cachet de la fabrication manuelle (illustrations et détails sur le blog de Libon et son dernier billet d'une série de quatre sur la fabrication maison de cahiers).
Vous avez fait un fanzine !
Je pense avoir fait le tour de tout le processus, mais il est possible que vous vous retrouviez face à des questions que je n'ai pas anticipées, ou qui font suite à des explications peu claires de ma part. N'hésitez franchement pas à venir me demander sur Mastodon ou à m'envoyer un mail sur blogdepatate arobase laposte point net. Si j'ai un petit flot de questions je ferai sûrement un billet de blog complémentaire sous la forme d'un F.A.Q.
from Blog de Patate
On va commencer par se mettre d'accord sur la terminologie, parce que le fanzinat par définition c'est un peu le fait de s'auto-publier. Et même ça c'est un peu un abus de langage, parce que comme son nom l'indique, à la base le fanzine c'est un magazine de fan, celui qu'il ou elle fait elle-même, pour parler des concerts et disques de ses groupes punks préférés, par exemple. C’est fait avec peu d’argent, donc pas mal avec les moyens du bord, au point que le mode de réalisation va se confondre avec sa vocation pour définir le média, ce qui fait qu’aujourd’hui, et ça ne va peut-être concerner que moi, quand je pense à un fanzine, je pense à ça :
C'est le format le plus usité pour cette pratique : le petit magazine imprimé en noir et blanc sur la photocopieuse de son syndicat étudiant. Le papier a pris l'humidité dans le local que la fac a bien voulu laisser à disposition, les aplats de noir sont pas ouf, pour ne pas dire dégueulasses, l'équilibre des marges n'a jamais été configuré, ptn y a plus de toner dans la machine, t'as les clés du placard toi ? Mais on s'en fout parce que ce qui est trop bien, c'est qu'on l'a fait soi-même, sans dépendre de la validation éditoriale de qui que ce soit, et que ça a coûté que dalle.
Je propose qu'on voie ensemble comment s'auto-publier sous cette forme précise, celle de ces bonnes vieilles feuilles A4 qu’on plie en deux et qu’on agrafe la veille du concert, du festival ou de la manif. Ça peut concerner n'importe quel contenu : bande dessinée et essai politique pour les plus répandus, mais on peut en faire ce qu'on veut (nouvelles, journal, recettes de cuisine, musique, cinéma, tout ce qui s'écrit, se dessine et veut être partagé).
On parle d'une impression en mode brochure (ou mode livret, booklet en anglais) format A4 ouvert, A5 fermé, piqûre à cheval deux points métal. Plus grossièrement, il s'agit d'imprimer plusieurs pages demi-format recto-verso dans un certain ordre (on verra ça un peu plus tard) pour qu'on se retrouve au final avec des feuilles A4 qu'on n'a plus qu'à plier en deux ensemble, on bouère deux agrafes en plein milieu et paf ça fait des chocapic.
Oui. De la même façon que le CD et ses 45 minutes pour calmer les ardeurs des groupes de post-rock, que la pellicule de projection pour où c’est qu’on met les fondus au noir dans les films, l'impression en mode brochure va imposer certaines limites physiques, essentiellement sur le nombre de pages, avec ces deux contraintes :
Au pire, vous pouvez toujours tricher en ajoutant des pages blanches pour arriver à ce multiple. En édition il est de toute façon normatif que la page 2 (le verso de la couverture, appelée deuxième de couverture) soit vierge, par exemple. Les pages de fin également. C'est un peu tricher oui, mais n'avez-vous jamais acheté ces agendas avec toute une floppée de pages à carreaux ou à lignes intitulées “Notes” à la fin ? Ce sont des gens qui se sont retrouvés confrontés à ce genre de contraintes de reliure et qui ont fait du remplissage.
le grand maximum de pages à lire sera de 100. Et encore c'est abusé. Cent pages, ça 25 feuilles imprimées recto-verso. Si vous avez du papier destiné au recyclage chez vous, essayez de plier 25 feuilles ensemble d'un coup : c'est raide. C'est pour ça que c'est une limite qu'on retrouve dans les modules de finition robotisés des machines de reprographie : au-delà de 25 feuilles, la machine dit non, met la tâche d’impression dans les travaux finis sans avoir rien sorti, fait grève sans préavis et va craquer des fumigènes place de la République.
Ben vous écrivez, dessinez, mettez en page. Utilisez le logiciel que vous voulez. Traitement de texte, PAO, logiciel libre, votre abonnement Office 365, on s’en fout. Ça va être l’étape de la création, donc clairement moi à ce moment-là je dégage. La création c’est votre affaire donc le ou les outils qui vous mettent à l’aise aussi. Je donnerai seulement ce solide conseil en amont s’il s’agit de texte et/ou de mise en page : travaillez au format fini. Si vous imaginez que votre fanzine au format fini, plié, sera en A5, ne travaillez pas sur le format A4 ou Letter proposé par défaut. Le A5 est un vrai standard de papier, répandu, il ne sera pas difficile de le trouver dans les paramètres de page de LibreOffice ou autre. Cela vous évitera la mauvaise surprise de la lisibilité pas folle des caractères ou des marges un peu limite une fois imprimé à 70% de ses dimensions. Également, ne vous souciez pas de l’ordre d’assemblage de vos feuilles, travaillez dans l’ordre de la lecture souhaité, comme n’importe quel document.
Vous avez fini ? Cool. Ça fait quoi, 20 pages ? Ok. Deux suites possibles s’offrent à vous :
Ben là, rien à faire. Vous exportez votre travail en PDF et vous y allez. Pas de bidouille supplémentaire à prévoir sur votre document : les ateliers de repro sont équipés de logiciels et de scripts d’imposition qui permettent en quelques clics studieux de mettre les pages dans le bon agencement pour que la machine fasse le reste, et le fanzine sort déjà plié et agrafé. L’impression noir et blanc, ce n’est pas cher, la finition piqûre à cheval normalement ce n’est pas facturé, c’est bon plan.
C'est tout à fait possible, et tout à fait amusant. Pour cela, rendez-vous à la deuxième partie.
Bisous !
from Blog de Patate
Cette question de merde.
Question de merde et pourtant je crois qu'elle est importante.
Elle est importante. Parce qu'on nous fournit déjà une réponse toute faite, gratuite, et j'imagine assez bien une règle, une posture pourquoi pas, qui voudrait que plus une société fournit une réponse tellement évidente qu'elle se passe d'explications un minimum concrètes, plus au contraire il va être important de se la poser. À soi-même, intimement, à l'autre, entre nous, jusqu'à collectivement.
Dans le cas des questions de genres, et en l'occurrence celles ici de la masculinité parce qu'étant un homme je ne me vois pas parler d'autre chose, c'est quand même complexe.
Ça se bouscule à toute blinde dans ma tête donc il va me falloir un point de départ, on va essayer de partir de ce qu'est supposé être un homme.
Un homme c'est fort. Un homme ça travaille, ça fait même carrière, c'est intelligent, ça fait du sport, ça protège, ça intervient, ça raconte ce que ça peut faire d'intéressant, d'impressionnant, un homme c'est drôle, ça sait plein de choses. La phrase que je viens d'écrire là est très convenue, mais ne reconnaissez-vous pas ces soirées où vous ne savez rien faire d'autre que piocher dans cette liste quand il s'agit d'entamer une conversation avec un autre homme que vous ne connaissez pas ? Parler boulot, raconter votre dernier accomplissement personnel, ce que vous avez fièrement envoyé bouler dans votre vie, raconter ce qui pourrait vous donner un rang et susciter un “ah ouais” poli mais approbateur. Tous les mecs, on fait ça. Et si vous avez fait autre chose, vous avez senti le petit malaise, ce petit regard dans le verre parce qu'il y en a un des deux qui ne sait pas gérer cette information. Oui, parce qu'en plus il faut gérer, juste accueillir on ne sait pas faire non plus.
Bref, c'est là. Ça nous a façonnés intimement, qu'on l'ait voulu ou non, ça a été notre bain même si on estime avoir eu tout le long le tempérament nécessaire à en critiquer la température. Surprise, ça ne nous a pas rendu différents pour autant, juste plus décents. Peut-être.
À ce stade, je pense que vous pensez que je n'ai pas une très bonne opinion de mon propre genre. Ça va justement me faire arriver à une articulation qui va me servir.
J'ai grandi avec un père que j'ai fini par détester. C'est un homme qui, bridé par une éducation religieuse stricte, ne s'aimait pas beaucoup en tant qu'homme non plus, du moins je devine. Il était abusif, je ne l'ai plus vu après le divorce de mes parents. J'ai évolué à l'école en marge de groupes de garçons que j'ai fini par détester aussi. Ils parlaient fort, n'avaient pas peur d'avoir mal ou d'avoir peur, mimaient avoir une grosse bite qui soulève le bureau quand une fille était jolie, tout ça était évident pour eux et je ne pouvais pas être différent au point qu'il valait mieux qu'ils fassent ça dans leur coin, le monde devait les voir faire parce que c'était drôle, et surtout normal, c'était ça être un garçon. Ceux qui avaient compris ça, que je ne m'inscrivais pas dans ces règles, je pense que c'était ceux qui m'ont le plus emmerdé, et fait peur, sans que je moufte. Mais peut-être que je surinterprète la source de leurs comportements que j'ai connus pour mieux me valoriser et me faire justice. Quoiqu'il en soit il y avait ces garçons-là, aussi. Les mêmes, moins nombreux, mais suffisamment pires pour que je me souvienne de leurs noms complets. J'ai fini de grandir, en pré-ado puis en ado, avec ma mère et ma sœur de très loin mon aînée. J'ai assisté à leurs conversations sur les hommes pendant les repas. Ce n'était pas plus glorieux chez les hommes adultes.
J'en arrive au point que je voulais atteindre : le contre-exemple en norme établie, et exister en son milieu.
Je crois que je comprends ces hommes qui se braquent à chaque fois qu'un de leurs comportements est passé à la saine moulinette du féminisme : ils ont un réflexe d'amour-propre. Oui, c'est naze, c'est en plus le foyer de départ des réponses agressives qui constituent le comportement toxique collectif justement dénoncé avant qu'ils ne s'énervent, mais le réflexe de départ est inévitable : personne ne veut se détester. Question de survie, je crois qu'on n'y peut pas grand-chose. Tout comme on ne peut pas grand-chose à ce réflexe de survie qui nous fait esquiver toute possibilité d'être rejeté·e·s socialement. Et c'est là qu'on peut poser l'index : chez ces hommes-là survient le choix à faire entre ces deux instincts, qu'est-ce qui sera le plus opportun entre son amour-propre et l'acceptation par le groupe des femmes pour sa survie et son bien-être ?
Chez les hommes, l'amour-propre est acquis, par la force de persuasion dès le plus jeune âge, artificiellement donc s'il le faut, et il le faut. Véritable forteresse en carton ondulé, n'en devient que plus fragile et prioritaire à défendre, tandis que (le raccourci va être facile mais je ne lui trouve pas tellement de contre-arguments ni de subtilités à opposer) le pouvoir communautaire des femmes sur leur légitimité dans les groupes humains va être bien peu de choses dans leurs considérations.
C'est là que doivent entrer en scène deux contre-pouvoirs, et un seul l'a fait, à savoir les femmes qui se lèvent et qui se cassent. L'autre, je pense que ce sont les hommes et en l'état ce n'est pas possible. Parce qu'un homme qui a grandi, qui s'est formé en-dehors de la définition dominante de la masculinité ne se donne aucune légitimité sous cette étiquette. Il n'a pas eu de modèle positif à disposition, s'est contre-construit, ses briques sont des négations, c'est un outsider et ça sera sa seule définition. Individuellement comme vu du petit groupe masculin ou mixte qu'il arrivera à rejoindre ou à constituer, ça ne sera pas un homme. Ça sera un militant, un punk, un hippie, un allié, un libriste, un youtubeur. Mais pas un homme. Un homme c'est pas terrible, un homme c'est ce qui lui aura fait rejeter à la fois son monde et peut-être son propre corps en grandissant pour faire mieux que ses parents, pour faire mieux que les harceleurs du collège.
Il y a quelques années maintenant, ma compagne m'avait fait un commentaire sur ma masculinité. C'était un commentaire positif. J'ai cette tendance à vouloir accepter les compliments pour m'en servir. Sauf que là je ne comprenais pas ce qu'elle voulait dire. C'était antonyme. Et ça m'a hanté. Pendant bien deux ans. J'en avais parlé à des copains et eux non plus n'avaient pas eu d'explication à me fournir, soit parce que ce n'était pas un sujet à aborder entre hommes, soit parce que eux aussi étaient dans ce même schéma dissonant.
Aujourd'hui, je suis un homme. Ça m'a coûté quelques séances psy, mais je suis un homme, j'ai ma définition de la masculinité, cette définition est légitime. Elle aura peut-être, sûrement, des similarités avec les autres masculinités de mes amis et de là, un sentiment d'appartenance et de reconnaissance. J'ai une masculinité et elle me fait accepter de regarder les gens dans les yeux quand je leur parle, briser les codes virils de vérification et de validation en les ignorant, et on me sourit en retour plus souvent que je ne l'aurais imaginé. J'ai une masculinité et elle me permet d'avoir un socle depuis lequel je peux moi aussi me lever et me casser, déclarer mes ennemis, dont cette norme qui m'a fait me sentir un peu étranger à moi-même, et l'aliéner, elle. Dire “je”, dire “nous”, parce que ça a un sens politiquement d'avoir ses propres combats plutôt qu'expliquer ceux des autres parce qu'on croit s'y reconnaître. Et alors faire partie d'un tout.
from Blog de Patate
Encore un appel sur Mastodon pour inciter les auteurs et autrices de threads considérés comme trop longs à ouvrir un blog.
C'est cohérent. Je ne trouve pas grand-chose à redire à cela car, et j'en fais l'exercice moi-même depuis quelques temps, le format s'y prête, et les attentes de ce qu'on a envie de lire sur tel ou tel type de plateforme est respecté. Et puis c'est bien d'avoir de la place. Pour avoir pratiqué les threads sur Twitter très longtemps, puis dès mon arrivée sur Mastodon, ça peut être accidentel : on a une courte mais franche réaction à un contenu, laquelle est associée au besoin de s'exprimer, de se décharger un peu, on avait sincèrement l'intention de faire court et efficace. Et finalement on avait plein de choses à dire. On réagit à ce qu'on a écrit soi-même, on affine, on nuance, on appuie. Et oui, pour ça, le blog c'est mieux. Ça a le défaut majeur de ne pas pouvoir s'écrire vite fait debout dans la cuisine entre deux coups de cuillère en bois, il faut se forcer un peu plus à prendre le temps, mais c'est pour le mieux en termes de réflexion, de contenu, de fluidité offerte à la lecture.
Là tout de suite, je suis vautré dans un fauteuil au chaud, la bibliothèque municipale offre presque le même calme que chez moi pendant que ma fille kiffe sa vie en autonomie à la fête foraine avec ses autres pré-ados de potes, ça valait le coup d'attendre un peu et de ne pas publier mon thread à l'arrache depuis mes toilettes.
Bref, vous me voyez totalement d'accord avec cet appel, jusque physiquement.
Et pourtant qu'est-ce que vous pouvez être gonflants pour certains d'entre vous. Je laisse le masculin exprès. Parce qu'en arguments soutenant cet appel j'en ai lu des trucs gênants. J'ai lu des gens s'offusquer de ce que la plus jeune génération pouvait ne même pas savoir ce qu'était un « blog », non mais allô quoi. J'en ai lu d'autres soutenir qu'on ne pouvait pas former nos jeunes au numérique sans qu'iels ne se louent un espace privatif associé à leur propre nom de domaine. Bref, si nos jeunes ne savent pas utiliser internet tout en se défendant de ses dérives c'est soit parce qu'ils et elles sont trop connes, soit parce qu'il n'y a pas de jusqu'au-boutisme dans la démarche. Je vous ai vus, physiquement, avec vos barbes et vos vues basses de quadra/quinca, avec votre bière artisanale et votre clope roulée, avec vos rides qui serpentent vos visages blancs illuminés de cette suffisance propre aux gens un peu en marge, qui auraient pu être une inspiration nécessaire sauf qu'ils sont trop frustrés de ne pas l'être, comme tout mec passé un certain âge. Au lieu d'être des lanternes, vous êtes des panneaux d'avertissement. C'est dommage.
C'est dommage parce que oui, internet aurait pu être mieux. Oui, les logiciels libres ont des vertus extraordinaires, on cherche, on en vient à s'intéresser à sa machine, on s'approprie des outils au lieu d'en être client⋅e⋅s – et même juste en les utilisant, on discute, on s'améliore, on améliore.
Mais je comprends qu'on n'ait pas envie d'aller vers vous. Je n'en ai pas envie, les plus jeunes non plus. Peut-être êtes-vous minoritaires, personne ne le saura jamais. Heureusement il y a aussi des gens doux, qui proposent, sont là, accessibles, laissent vivre, laissent venir. Nous pouvons être ces petits vieux tranquilles tant qu'on ne les éloigne pas trop du radiateur, avec cette force de proposition qui se contente d'être disponible, ou nous pouvons être ces vieux idiots, avec rigoureusement le même savoir, mais qui se désolent à 120 dB pendant les repas que les jeunes sont trop cons de ne pas s'intéresser totalement à [rock alternatif / langue régionale / logiciels et internet libres / ouvrage de philosophie libertaire / ...] comme eux l'ont fait.
Donc bon, calmez-vous.
Cordialement, Patate